Une organisation « so british »

  Le « cliché » s’invite toujours dans nos valises lors qu’on s’aventure vers des destinations inconnues. Feuilleter quelques pages de guides bon marché ou faire défiler quelques informations sur une page web ne produisent en général que des interprétations d’une réalité autrement complexe .

 Le choix de Malte comme destination pour apprendre ou perfectionner l’anglais avait fait sourire plus d’un de notre côté de la méditerranée. Une destination où le soleil brille plus que dans son jardin est toujours suspectée de n’être qu’un lieu propice à la villégiature et au farnienteIl ne nous a pas fallu longtemps pour comprendre, au regard du nombre d’étrangers, de sa diversité et de leur attitude  que nous n’étions pas dans une destination vouée uniquement au tourisme de masse, mais dans un gigantesque Campus international dissémine sur toute l’île dans lequel notre école fait figure de cinq étoiles.

   ETI est un centre de formation qui appartient à une nébuleuse d’autres centres dont le nombre et l’amplitude de la gamme des prestations nous échappe.  Il se situe dans un bâtiment moderne, en plein centre de la ville de Saint Julian, dans un quartier vivant qui grouille d’apprenants de tous âges venant du monde entier. L’édifice abrite une résidence et une brasserie tout comme les structures d’enseignement qui s’éparpillent dans les étages et les couloirs d’un petit labyrinthe dans lequel fourmillent affairés, enseignants, élèves et  personnels ese-school-building-380x380-cropedtechniques et administratifs.

 l’accueil administratif se fait en trois langues dans un souci immédiat d’efficacité et précision. Rien ne semble laissé au hasard, aucun point n’est négligé, aucun doute permis. Tous les aspects du contrat sont vérifiés. Suite à une modification d’hébergement imprévue des excuses fusent et des compensations (visites guidées gratuites en anglais ) sont proposées sur le champ. Nous n’avons pas affaire à une structure qui balbutie sa gestion. La réactivité est impressionnante.

  Avec une courtoisie et une efficacité frappante nous sommes dirigés et présentés à nos groupes respectifs. Ce que nous avions pris pour un préalable anecdotique s’avéra être un outil pédagogique d’envergure…le test de niveau.

 

L’expérience maltaise

accueil ETI Depuis un avion Malte a des allures de radeau perdu en mer. En approchant se dessinent d’abord les contours d’une grande citée aux limites diffuses, puis des sentiers tortueux conduisant à des champs exigus et morcelés à outrance, au point de ne paraître que des prétextes à élever des murettes.

Les remparts imposants des citadelles apparaissent alors comme le délire d’un fou venant frapper d’alignement ce qui n’était jusque là que courbes et volumes ronds. Voulant dominer, par l’angle, le point d’inflexion.

 A travers le hublot un air de déjà vu nous renvoie aux images des villes du moyen orient où le gris du béton bon marché se dispute au bas des grues, avec la pierre calcaire, le droit d’ajouter un cube, un balcon, une tourelle de plus, au chaos architectural de maisons qui se prennent pour des chateaux. On survole des terrasses qui étirent leur cou cherchant une mer qu’elles savent proche mais qu’elles n’ont jamais vu et ne verront jamais, des jardins cachés, des jardins secrets aiment se faire sentir, des rues sans trottoirs qui n’ont jamais connu le goudron. Des goudrons qui ont trop vécu.

  Encerclés, quelques bâtiments modernes cachent la mer avec l’arrogance que donne le métal et le verre sur lesquels brillent les enseignes des puissants, comme naguère le faisaient les blasons et les fanions des nobles de l’ordre de Saint Jean de Jérusalem.

…Notre hôtesse nous sourit sous son écriteau ETI qui s’agite au milieu d’une foule bigarrée de cartons, feuilles de papier glacé, et autres logos volants, de ce que nous supposons être des écoles d’anglais en attente de « students ». Derrière eux, une silencieuse  armée  de chauffeurs  chemiseblanchés et cravatés attend son ordre d’invasion.

 …Distribution de clés et consignes et nous voilà déjà séparés de la  jeune fille dont les manières nous avaient laissé supposer,  le temps d’un sourire, qu’on se connaissait depuis si longtemps que notre relation amicale allait dépasser les cinq minutes et les vingt mètres qui nous séparaient de la porte de l’aéroport. Nous fûmes livrés aux chauffeurs…


 …L’expérience de la conduite à droite nous submerge alors dans un stress qui nous pousse au mutisme. Le sens de l’observation, si précieux en voyage, est collapsé par de messages en provenance de notre cerveau reptilien qui nous indiquent que quelque chose de pas normal se déroule à l’extérieur de la voiture. les priorités ne sont pas respectées, les rond points tournent à l’envers…notre chauffeur n’est pas assis au bon endroit, de même que le passager de la voiture à notre gauche,  au feu rouge, qui a manifestement un volant entre ses mains.

  Nous voilà arrivés, plus vite que nous ne l’aurions souhaité, à l’entrée du bâtiment….Neuf!!! Tellement neuf, tellement blanc, propre et vide qu’on se demande s’il ne faut pas enlever les chaussures depuis la rue jusqu’aux appartements du troisième et quatrième étage.

Le temps de faire la reconnaissance des lieux nous constatons la présence d’un allemand, un fantôme et trois jeunes femmes, deux coréennes au 8 et une brésilienne au 9.

  Début de nos balbutiements en anglais. Ce n’est pas terrible…ou alors si, c’est terrible. Mais c’est pour ça qu’on est là, non?